Né en 1967 en Touraine, j’ai commencé à m’intéresser à l’art à travers les travaux de couture de ma mère. Ainsi, les tissus, les motifs et les matières ont orienté ma création. Au début émerge une émotion. Touché par les phénomènes de société et l’histoire de l’Homme, j’ai le désir d’apporter mon témoignage de manière à interpeller le monde qui m’entoure. Dans mon travail, la question du genre vient interroger, explorer, déboîter l’identité au sens large : sexuelle, raciale, nationale, voire religieuse… Je me propose de questionner les évidences, tel l’ordre des choses supposé naturel, manifeste, incontestable, en m’appuyant sur cette pensée qui remet en cause la norme comme instrument de domination… Ma réflexion est portée par le questionnement du mouvement queer en tant que contestation radicale de la prédominance du modèle binaire de genres et des stigmatisations sociales. C’est le refus d’appartenance à l’hétéronormativité, à être identifié-e/désigné-e comme homme ou femme, et par conséquent comme hétéro, homo ou bisexuel-le. Par extension, cela vient interroger toute subordination du corps à une donnée patriarcale tel que le genre, l’ethnie, la religion, la race (en tant que construction sociale)… Le corps devient alors outil de transgression, de contestation et de décolonisation. Le corps permet de transmettre et d’éveiller l’inconscient de chacun-e, de soi face aux autres. Il met à jour les oppressions et permet un éveil politique. Ceci est vrai pour l’ensemble de ce que la société appelle « minorité », contre des systèmes de domination (raciste, capitaliste, hétéro-patriarcal). Le corps comme révélateur de l’inconscient de chacun-e, pour aller, peut-être, vers une conscience politique…     

 Et vient 2018… Rencontre. Ielles arrivent d’Afrique.

 Traverser la Méditerranée, lieu de passage, pour elleux, ce fut à la fois un changement d’État et une transformation d’état. Transition d’une place à une autre, d’une phase à une autre… un entre-deux. Des dynamiques de transition, de rupture, de déconstruction - suspension - reconstruction à travers l’abandon de l’identité et la rencontre avec l’altérité ont été à l’œuvre. Pour y accéder, elleux ont dû sortir du territoire de la communauté pour demeurer un certain temps dans un espace potentiellement dangereux, étrange… et créatif. Il me semble avoir été soumis, d’un point de vue psychique, à ces mêmes transformations…